Vous êtes ici : Accueil > Lu, vu, entendu, visité > Journal | Novembre 2019

Journal | Novembre 2019

 
  • (jeudi 31), vendredi 1er, samedi 2 et dimanche 3, orgie : vingtièmes Utopiales !!!
Lecture musicale Alain Damasio & Palo Alto
Lecture musicale Alain Damasio & Palo Alto

Les Furtifs, Lecture musicale par Alain Damasio & Palo Alto

Là encore, un boulot énorme et formidable sur le son, de l’écriture du texte et de la partition, sur la voix, le rythme, les images projetées en arrière-plan, en avant-bocal, qui forment un ensemble envoûtant, hypnotique, par lequel je me suis volontiers laissée emporter. Mais dans l’hypnose, étonnamment, malheureusement, je n’ai pas trouvé l’émotion. Pour moi trop intellectuel, cérébral, alors que c’est pourtant tout le corps qui voudrait vibrer... Sensation étrange. C’était cependant fascinant d’être là. La critique est facile, l’exercice présenté l’était beaucoup moins. Un grand merci pour la générosité qui elle est indiscutable.

 

Chestley Bonestell : un pinceau d'avenir
Chestley Bonestell : un pinceau d’avenir

Chestley Bonestell : un pinceau d’avenir, film documentaire de Douglass M. Stewart, 2019 Première

Documentaire à l’Américaine, fort de témoignages personnels et confidences de gens qui ont un jour croisé Chestley Bonestell. C’est pas ma came sur la forme. En revanche, le fond permet la découverte de cet illustrateur, artiste de génie, qui donne envie de creuser pour en (sa)voir plus, et c’est assurément tout ce que je demande à un documentaire [1] ! =)

 

Le voleur d'arc-en-ciel (Director's Cut)
Le voleur d’arc-en-ciel (Director’s Cut)

Le voleur d’arc-en-ciel (Director’s Cut), film d’Alexandro Jodorowski, 1990/2019 Séance spéciale

Le plaisir La joie Le privilège Le :-O d’avoir Jodo himself sur scène pour raconter l’histoire rocambolesque (et pourtant sûrement pas si exceptionnelle que ça) de ce film, la magie de l’entendre parler de ce qu’il avait en tête, de ce qu’il voulait transmettre, ce qu’il a longuement attendu avant de pouvoir remanier le matériel de départ issu d’un tournage apparemment chaotique, pour aboutir à ce que nous avons pu enfin découvrir là : une vraie poésie à la Jodo, du diamant brut. Alors oui, niveau cinématographique pur, on sent le rafistolage, il va sans dire qu’il semblait difficile de retourner des scènes 30 ans après (notamment celles avec Peter O’Toole et Omar Sharif), mais le cœur de l’histoire est là, et quel cœur !!
En bonus, la surprise d’y trouver un visage connu et voisin, cerise sur ce cadeau vaporeux et coloré comme un arc-en-ciel...

 

Upgrade
Upgrade

Upgrade, film de Leigh Whannell, 2018

Bien foutu, éclaboussant et drôle, avec une fin qu’on imagine rapidement téléphonée mais en fait non, et qui aborde néanmoins des thématiques bien profondes sur notre rapport à la technologie, au transhumanisme, notre désir de supériorité, d’éternité, la quête mal interprétée du Surhomme nietzschien, et cela sans se prendre au sérieux. Pas un futur classique, mais un excellent divertissement intelligent !!

 

Space Adventure Cobra
Space Adventure Cobra

Space Adventure Cobra, film de Osamu Dezaki, 1982

Était-ce l’heure tardive, juste le fait que je n’étais pas dedans, ou que mon regard aura changé depuis l’époque où je regardais la série à la télé (probablement bien trop tôt pour mon âge dirait-on aujourd’hui ^^), les aventures de ce héros bien trop proche d’une représentation du Bebel au mieux de sa forme (qui m’avait jusqu’ici échappée, au secours) aimé successivement par trois sylphides à gros nibards qui n’en réchapperont pas, me passe au-dessus ? L’écriture n’est ni naïve ni dénuée de sens, mais l’enveloppe colle (si j’ose dire) peut-être un peu trop à des fantasmes adolescents qui me sont inconnus. ^^

 

Man Ray et les équations shakespeariennes
Man Ray et les équations shakespeariennes

Man Ray et les équations Shakespeariennes, film documentaire de Quentin Lazzarotto, 2019

Attention ! Du très très bon !!! Transversal, ce doc explore la poésie (pour moi la béotienne) qui relie finement les mathématiques, l’art, la lumière, et les émotions que cela suscite en nous, entre décryptage du (d’un ?) réel, chacune à leur manière, tentative de compréhension de cet inconnu qui nous entoure, nous interroge, nous plonge dans les profondeurs du vertige métaphysique, au travers des explorations de Man Ray, photographe, peintre, réalisateur surréaliste et dadaïste et de son travail sur les objets mathématiques, sortes de sculptures fascinantes modelées sur des équations remarquables, trouvées à l’époque sur des étagères de l’Institut Henri Poincaré, photographiées, peintes, et sur lesquelles il a projeté les titres de pièces de Shakespeare. La forme est au niveau du fond. Passionnant et captivant, du bonbon pour tous les curieux de l’Univers connu (et inconnu).

Un bout de pelle pour commencer à creuser...

 

L'eau El agua
L’eau El agua

L’eau El agua, court-métrage d’Andrea Dargenio, 2019 Prix du Jury

Le résumé : « Un homme se réveille dans un monde où l’eau a disparu. Cependant, tout le monde agit comme si rien ne s’était passé. » Trésor d’humour et de poésie qui aborde pourtant des problématiques bien actuelles. Notre aveuglement lourd de conséquences... Petit bijou !

 

 

Little Joe
Little Joe

Little Joe, film de Jessica Hausner, 2019 Avant-première, Grand Prix du Jury

Grand Prix et pourtant, je ne suis pas sûre qu’il connaîtra un succès grand public (pourvu que l’avenir me détrompe !). Film intrigant, immensément dense sous son aspect un peu creux ou trop voyant... Les sujets abordés le sont pourtant tout autant et semblent ironiquement passer inaperçus aux yeux du plus grand nombre. J’y vois les rapports familiaux parfois conflictuels et la difficile voie de l’individuation à l’arrivée de l’adolescence (métaphorique ?), j’y vois les travers de nos comportement sociaux, les stigmatisations que nous faisons porter aux autres comme réassurance pour nous de faire partie du groupe dominant (donc celui qui a forcément raison), j’y vois les biais psychologiques qui mènent à ces comportements, j’y vois les dangers face à la liberté que nous sommes prêts à sacrifier pour la facilité, une fragilité humaine exploitée nonchalamment aussi bien par le blé qui recouvre nos champs et auquel nous devenons progressivement allergiques (mais lui a réussi son expansion planétaire) ou par les GAFAM et autres industries que l’on nourrit sans ciller avec nos vies et nos besoins affectifs non satisfaits et qui se gavent de pognon sur notre dos. Jusqu’où sommes-nous capables d’être parasités ? À moins que notre propre position de parasites (en tous cas dans les comportements que nous adoptons) ne nous empêche toute clairvoyance ? Croissez et multipliez qu’y disaient... Un prix largement mérité, même si je ne doute pas de la qualité globale de la sélection de cette compétition internationale.

 

Encore un peu ! ^-^
Utopiales 2019
Utopiales 2019

Mais les Utopiales, c’est aussi des expositions (cette année autour du travail de Matthieu Bablet, Jean-Claude Mézières, François Schuiten et Laurent Durieux, entre de nombreuses autres mêlant art et sciences), des tables rondes, conférences, rencontres, autour des sciences, de la littérature, de la bande-dessinée, du cinéma, des jeux de société, des jeux vidéo, du jeu de rôle, la plus grande librairie des Littératures de l’Imaginaire de l’Univers, notamment... la Grand-Messe quoi =)

 

Utopiales.orgQuelques conférences captées sur la chaîne YT Ideas in ScienceQuelques autres captées par ActuSF et à retrouver sur leur site

 

 
  • mardi 5, musique contemporaine en vrai
Ensemble Sillages
Ensemble Sillages

Ensemble Sillages

Au programme de ce soir des pièces de Samuel Andreyev, Sextet in two parts (création 2019), de Noriko Baba, Doppio Trio (2017), et de Jean-Luc Hervé, (Re)transmission (2018) et Sillage (création 2019). Jeux sur les sonorités, la spacialité, les images et les émotions, avec une inventivité impressionnante.
L’ensemble est servi par des musiciens talentueux, sérieux, profonds et espiègles. Je ne pousserai pas l’analyse, j’en serais bien incapable, mais j’ai vraiment apprécié les « là » [2] où ça m’a emmenée. Après en avoir souvent entendu sur Radio Bisounours [3], ce qui a sans doute participé à préparer mon écoute, je suis heureuse d’en avoir (enfin !) vue de mes vraies oreilles et entendue de mes propres yeux, en direct et en concret. Vraiment beaucoup aimé.

Pour les curieux

 

 
  • jeudi 7, déception confirmée et consolation sucrée
Les Mystérieuses Cités d'Or
Les Mystérieuses Cités d’Or

Les Mystérieuses Cités d’Or, série de Jean Chalopin, Bernard Deyriès, Kenichi Maruyama, 1982

Comme je le présageais, les étoiles scintillant dans mes yeux à la pensée des Cités d’or ne survivront pas au développement de mon esprit critique (et je suis pourtant bon public)... 0_o’
L’idée globale du scénario était et reste à mon sens très bonne. La fin aussi. Les dessins, bon... on mettra ça sur le dos d’une contrainte économique. Mais le développement de l’histoire au fil des épisodes... Et les dialogues ! (à la limite de) l’indigence. Comment pouvait-on à ce point-là prendre les spectateurs, fussent-ils jeunes, pour des abrutis ?! (et la blessure de ne m’en apercevoir que 35 ans après... à ma décharge, j’étais très très jeune quand je regardais cette série -_-)

Après ça, c’est beaucoup moins sereinement que je m’interroge sur un éventuel revisionnage d’Ulysse 31... ^_^ Des aventuriers parmi vous ont-ils déjà essayé ?

 

Mortimer Les annales du Disque-monde
Mortimer Les annales du Disque-monde

Mortimer Les annales du Disque-monde, de Terry Pratchett, 1987, 1994 pour la traduction de Patrick Couton, L’Atalante

Série découverte il y a déjà quelques années, faire partie des chanceuses et chanceux qui arpentent la terre du Disque-monde avec les yeux de la découverte, grand ouverts et plein d’étoiles, avec délectation et lenteur, pour faire durer ce plaisir le plus longtemps possible (m’est avis que le nombre apparemment imposant des volumes n’est qu’un mirage trop vite avalé, autant se méfier ^-^)... Si vous ne connaissez pas encore, hasardez-y un pied sans réserve (le reste devrait suivre), chaque tome est une agence de voyage et de promotion qui vous emmènera explorer cet univers foisonnant de personnages et lieux hauts en couleurs, et de thématiques semble-t-il universelles abordées avec l’humour de Terry Pratchett (pas de qualificatif supérieur). Ne ratez surtout pas la visite d’Ankh-Morpok un soir au clair de lune à la suite de Rincevent ou du maître d’apprentissage de Mortimer, sensations garanties (5 étoiles sur TrippeAdvisor) !

Après lecture de ce volume je reste plus que jamais acquise à la cause, jeux de mots et/ou d’images haut niveau, humour précité au mieux de sa forme, même si je trouve la fin un peu brouillonne [4],

Attention SPOILER ALERT

Terry Pratchett aurait-il eu un jour l’occasion d’analyser le comportement d’un beau-père irrationnel (le beau-père le comportement) ?! ^-^

et comme après toute friandise trop vite disparue (par l’effet d’on ne sait quelle magie), me raisonne violemment pour ne pas fondre sur la suivante !

 

 
  • vendredi 8
Mythologies
Mythologies

Mythologies, essais de Roland Barthes, 1957 (2010 pour la présente édition illustrée), Éditions du Seuil

Lecture démarrée il y a bien longtemps, picorée par-ci par-là (sinon indigeste, faut être honnête), puis le temps était sans doute venu d’arriver à la conclusion. Bon timing en ce qui me concerne (comme souvent quand on laisse les livres faire).
Ouvrage en deux parties. La première présente une succession d’essais, exemples, analyses de ces fameuses mythologies, parues de 1953 à 1956 au fil de chroniques mensuelles (dans la revue Lettres Nouvelles), témoignages d’une époque et d’une société. L’époque et la société ont changé, certaines mythologies sont pourtant encore tout à fait d’actualité, d’autres de l’ordre de l’archéologie, mais par analogie on se rend vite compte que le développement marketing pourvoie copieusement à leur renouvellement, au point d’en devenir un véritable enjeu sociétal.
La deuxième partie, plus théorique, s’attache à l’analyse généraliste et à la fois plus profonde, pose les bases de l’étude sémiologique (accessible tout de même !), et apporte une lecture supplémentaire de la société à la lumière de « l’outil » mythologie, en décrivant les mécanismes du langage et de la représentation.
Pas besoin de grand effort intellectuel pour y trouver les débuts d’une vision du monde, d’un réel de plus en plus complexe au fur et à mesure des avancées scientifiques (au sens large) vers son décryptage (plus) fin, et représenté de façon de plus en plus simpliste et grossière, ce qui est à la fois garant d’une prise en compte globale nécessaire et d’erreurs de jugement parfois irréparables. Ou de détournements en instruments de manipulation de masse. Des mythologies, symboles, inférences, à des raccourcis douteux au service d’idéologies qui ne le sont pas moins. De la simplicité au simplisme, la fabrique de la novlangue n’est pas très loin.
Il manque encore de sacrées pièces au puzzle, entre cette analyse de la mythologie et celle de Mircea Eliade, pourtant bien constitutive elle aussi de nos sociétés. Peut-être une question de champs d’étude ? d’échelle ? de temps ?
Ici, à terme, on devine le bloc d’une société qui arrive en bout de sa course au « toujours plus », face auquel se lève un autre bloc qui s’est semble-t-il approprié les mêmes symboles de façon différente, un autre langage, une autre culture pour accompagner les changements qui se profilent... pourquoi ? comment ? sans doute quelqu’un l’a-t-il déjà étudié ou est en train, et ce doit être passionnant [5]. De l’importance en tous les cas de prendre conscience de tout cela. Un ouvrage comme celui-ci, malgré les deux (presque trois) générations qui sont nées depuis sa parution, y contribue encore, comme base d’une réflexion à construire dans la tentative de comprendre un peu mieux le monde qui nous entoure...

L’édition illustrée apporte à mon sens une vraie valeur ajoutée à la fois dans la recontextualisation et dans la mise en perspective de l’objet étudié et de l’analyse qui en est faite, surtout aux yeux de lecteurs pour qui les noms cités ne revêtent, avec le temps, aucune signification spécifique (pis ça met un peu d’air dans la mise en page !).

Et si d’aventure vous voulez acheter ce livre, y’a pas que les librairies du Grand Paris (sic le site du Seuil) ni par pitié les supermarchés en ligne que je préfère ne pas nommer : la petite librairie à côté de chez vous se fera un plaisir de vous le commander si elle ne l’a pas en stock. Autant en profiter tant qu’il en reste, avant que les sus-tus supermarchés en ligne ne nous expliquent quoi lire. Un geste simple pour soutenir l’indépendance et les libertés qu’on nous grignote en lousdé. Si si...

 

 
  • dimanche 10, « dimanche pluvieux, dimanche heureux »
Great Western Trail
Great Western Trail

Great Western Trail, jeu de Alexander Pfister (méca) et Andreas Resch (illus), Eggertspiele, 2016-2018

Great Western Trail est un jeu de stratégie et de développement sur une thématique western : le but du jeu est de réussir à valoriser au mieux une chaîne d’approvisionnement emmener des gentilles vaches découvrir la ville et développer son troupeau pour gagner plein de points. Pour cela, les joueurs ont la possibilité d’améliorer qualitativement ou quantitativement leur troupeau (par un système de « deck » [6] de cartes et de récompenses à des concours), construire des bâtiments et relais permettant un plus grand panel d’actions, et développer sa propre ligne ferroviaire. Beaucoup d’éléments à intégrer lors de la prise en main, un retour assez fréquent au livret de règles, mais une mécanique simple et finalement assez rapidement acquise. J’ai beaucoup aimé les différentes mécaniques, notamment de « deck-building », et la possibilité de développer une stratégie à long terme (compter 2-3 heures de jeu quand même hein :-) ), assez rare sur des jeux de plateau de ce type. Peut-être un petit manque d’interaction entre joueurs, difficile à dire sur une partie de découverte (il faut en général attendre au moins la deuxième pour maîtriser suffisamment et envisager de pourrir un peu le jeu des copains). En revanche, la thématique... on fait un peu de commerce avec les Indiens histoire de... , mais ils restent cependant très discrets, et pour le reste, je ne suis pas certaine que les vaches soient super fans de lèche-vitrines (en tout cas n’ai jamais remarqué), on serait donc peut-être pas loin d’une forme de maltraitance animale à laquelle je ne souscris pas (ayant moi-même horreur qu’on m’impose de faire du lèche-vitrines) :o). Le jeu est assez moche (même si on reste trèès loin d’un Antiquity, dont j’essayerai de causer à l’occasion, quand j’y rejouerai [7]), ce qui n’empêche pas l’immersion dans cet univers Far West, à ch’val pour mener son troupeau à travers les grands espaces, chapeau de cowboy sur le cou et poussière dans le nez. Reste donc pour moi un grand plaisir de jeu, amusant et stimulant.

Pour compléter une fiche éditeur un peu succincte...

 

 
  • lundi 11, horreur sans aquarelle
Pour Sama
Pour Sama

Pour Sama, film documentaire de Waad Al-Kateab et Edward Watts, 2019

Beaucoup de films importants en ce moment et à venir. Celui-ci en fait partie, à plus d’un titre. Dans le propos tout d’abord : le journal filmé d’une jeune mère, Syrienne, journaliste et épouse du médecin qui a décidé de recréer un hôpital dans les quartiers est d’Alep, destiné à sa fille, à l’époque tout juste arrivée dans ce curieux monde... L’estampille « scènes, propos ou images susceptibles de heurter la sensibilité » est ici hors de propos. C’est choquant. Mais ce n’est pas le film qui est choquant. C’est bien la réalité qui y est montrée. J’ai pleuré [8], et me sens démunie de continuer à voir des êtres humains abattre d’autres êtres humains, et ce sentiment est toujours présent. Le sera malheureusement longtemps. Ça a dû commencer pour moi dans les années 80, face aux infos et aux images de la guerre au Liban, en Iran, en Irak, en Palestine, face à ce qu’on entendait sur le bloc de l’est, ce qu’on pouvait ressentir, deviner, les soulèvements, Tian’anmen, et qui continue, un peu plus loin, avec d’autres humains (faut bien renouveler). Des chars face à de sombres silhouettes de coquillages, fines et fragiles. Et qui explosent comme on souffle un pissenlit en graines. Heureusement les idées essaiment, l’humanité et l’humanisme aussi. On avance. Petit à petit. Un peu moins de conflits. Un peu moins de famines. Un peu moins d’épidémies génocides. On fête juste les 30 ans de la Chute du mur (oui, je préfère honorer d’une majuscule un mot plutôt que l’autre). Grâce à des personnes comme Waad Al-Kateab, comme son mari, comme des tas d’inconnus, qui ont survécu ou pas, en résistant à l’oppression, en informant, en protégeant, en apportant un peu d’espoir, en faisant des choix cornéliens, aussi. En le voyant, vous aussi serez choqués. Probablement. C’est à espérer. Certains parleront de culpabilisation, personnellement je ne vois pas, sinon leur propre interprétation, donc positionnement, qui a alors trait à des choses personnelles extérieures au débat. J’y vois la remise en perspective du monde, d’êtres qui se battent pour exister d’abord, qui demandent à l’aide aussi (on se demande où est la « communauté internationale », même s’il est parfois difficile de cerner où commence l’ingérence (ou facile d’opposer cet argument ?)), et enfin nous crient « coucou on est là », à « nous » qui avons d’autres problèmes à gérer, d’autres ordres [9], mais sommes aussi parfois trop enfermés dans nos vies pour pouvoir ou vouloir voir ce qu’il se passe autour de nous. Là, pas loin, d’autres humains qui souffrent, qui ont besoin d’aide, qui ont une énergie et une gniaque (du désespoir ?) qui forcent le respect. Une expérience qui permet de (re)créer de l’empathie avec les autres, qu’ils soient ici ou plus loin, encore vivants, morts, à naître, des êtres qui n’ont peut-être pas la même culture ou la même langue, mais qui ont le même fonctionnement, les mêmes blessures, les mêmes doutes et les mêmes besoins... l’Autre, tout simplement.
Au-delà de ça, le documentaire, s’adressant à une petite fille qui vient d’arriver et n’est donc pas au courant des épisodes précédents, réexpose de façon très didactique et claire la chronologie des événements, entremélée à celle d’une famille en devenir.

Film important aussi au niveau de la forme  : il s’agit d’un montage pour le cinéma de chroniques, notamment parues sur la chaîne YouTube de Channel4, que Waad Al-Kateab a filmées avec les moyens du bord, sur le vif, sans intention particulière sinon de témoigner d’une situation de l’intérieur. L’interpénétration de différents médias, qui existent sur des plans temporels, des rythmes différents, auprès de publics parfois différents, de l’actualité au témoignage, du moment de l’action à celui de la réflexion. Deuxième fois pour ma part que j’assiste à cette hybridation dans la création (avec le film Coming Out) que je trouve réellement intéressante, tant en termes d’appropriation d’outils transverses que d’écritures et réécritures multiples et à plusieurs niveaux.

Pas facile de faire face à tant de violence. Ni de se dire qu’on va voir un film qui nous travaillera, tant émotionnellement qu’intellectuellement. Mais c’est aussi pour ça qu’on va au cinéma ou qu’on regarde des documentaires, non ? Mieux vaudra cependant en différer le visionnage si vous vous sentez fragiles en ce moment, à mon sens, l’idée n’étant pas comme dit plus haut de se flageller, mais plutôt de créer une empathie, qu’il faut être en mesure d’accueillir.

 

 
  • mercredi 13, je préfère quand même l’autre version...
Le Maître du Haut Château
Le Maître du Haut Château

Le Maître du Haut-Château, série de Frank Spotnitz, 2015-toujours en production

Découverte à petite dose depuis cet été des dix épisodes de cette première saison...
Loin de ce que j’ai gardé de la lecture du roman de mon auteur de S.F. breton préféré, Philip K. Dick, dont cette série semble être l’adaptation, par l’adjonction de nouveaux fils narratifs, de nouveaux personnages, et un traitement différent de ce qui existait déjà pour en changer totalement les thématiques.
On reste sur la même base : une uchronie où l’Allemagne et le Japon auraient gagné la Seconde guerre, des personnages dont les noms, situations et histoire restent à peu près les mêmes. Après l’histoire bifurque encore.
À la découverte d’une presque création originale donc, les personnages sont pas mal écrits, on sent que les événements à venir vont les mettre face à des remises en questions assez fondamentales, l’ambiance est assez bien rendue, quoiqu’un peu falote, et évite tout manichéisme patent [10], justement dans le soin apporté à la psychologie des protagonistes. Et pourtant j’ai pas accroché. Problème de rythme ou focus... quand l’Histoire commune semble un peu trop attachée à l’histoire personnelle de nos quelques protagonistes (dont les visages apparaissent par exemple dans un bout de film et où l’on se dit... ! rien, c’est pas poli, mais je l’ai pensé tellement fort que probablement vous avez entendu) que ça en devient ridicule. Y ajouter une bonne dose de patriotisme en mode « Américains sauveurs du monde » qu’on renifle à cent mètres et on obtient bientôt la subtilité du gravier après la tempête. Je ne sais pas vers quoi tout ça se dirige mais je ne suis pas sûre d’avoir envie de le voir.
Malgré toutes les distances prises donc, je ne replongerai probablement pas pour la deuxième saison. Ça ne m’a tout de même pas empêchée de largement apprécier la dernière image, double clin d’œil à 1962, date de parution du roman, et de sortie de Lolita dont on ne peut louper l’affiche... Je ne suis décidément apparemment pas la seule à apprécier Stanley Kubrick, comme c’est étrange.

Le Maître du Haut Château
Le Maître du Haut Château

Pis au passage, si vous ne l’avez déjà lu, n’hésitez pas à vous plonger dans le roman, à mon sens étude sociale et psychologique qui offre beaucoup de profondeur et une ambiance, là, bien palpable et immersive (ne vous attendez cependant pas à beaucoup d’action, ni à des combats à la mitraillette). Tout se passe dans la subtilité, les interstices, c’est ça qu’est bon !!

 

Le Maître du Haut-Château, roman de Philip K. Dick, 1962, J’ai lu

Allez zou !

 

 
  • vendredi 15, enchantements
Mystère des Voix Bulgares
Mystère des Voix Bulgares

Mystère des Voix Bulgares, concert polyphonique, Le Roudour

Polyphonie, beatbox et juste deux instruments (fabuleusement joués). Harmonie. Une preuve de plus, si c’était nécessaire, que l’être humain en ensemble est réellement capable de merveilleuses réalisations. Générosité d’un autre monde, envoûtant.

Ti’ bonus

 
 

Votre cerveau vous joue des tours
Votre cerveau vous joue des tours

Votre cerveau vous joue des tours, essai d’Albert Moukheiber, Allary Éditions, 2019

Livre de passage à la maison, par curiosité... À l’exploration du fonctionnement du cerveau qui façonne la représentation que nous avons du monde qui nous entoure, des « trucs » qu’il utilise, et des pièges dont il peut être victime, et donc nous avec. Ouvrage de vulgarisation grand public, il catalogue pas mal de biais cognitifs courants. Ça permet une première prise de conscience, sans doute la plus importante, sur la façon dont se forme notre opinion et la facilité avec laquelle cette dernière peut être manipulée si nous n’y prenons pas garde. D’une grande utilité donc. Mais qui ne peut constituer qu’une porte d’entrée.
Première étape d’un chemin vers la connaissance de soi, des rouages de la manipulation de l’information (tant interne, dans notre propre tête, qu’externe), d’une ébauche de compréhension de l’Autre et des forces en action à la constitution de notre société, et son évolution. Les curieux pourront approfondir leur réflexion en s’orientant vers la zététique, à commencer par exemple par les vidéos de l’excellente chaîne Hygiène mentale ou de la peut-être plus connue Tronche en biais [11], ou vers d’autres ouvrages un peu plus analytiques. Les plus curieux motivés par la soif d’essayer de comprendre un peu mieux le monde par cette porte pourront s’attaquer à un ouvrage plus conséquent d’introduction à la psychologie, comme le Zimbardo-Gerrig [12].

 

 
  • dimanche 17, désenchantements
Absol vidéos : « Notre effondrement »
Absol vidéos : « Notre effondrement »

Notre effondrement, documentaire réalisé par Absol, vidéaste sur YouTube, 2019

Réflexion qui mûrit depuis les Utopiales (sur un terreau déjà un peu sensibilisé quand même), notamment la conférence L’impossible pensée du cataclysme, visible sur la chaîne « Ideas in science » [13], et les conclusions (assez inquiétantes) d’un échange avec Roland Lehoucq à la suite d’une conférence autour de l’énergie, fort instructive (comme d’hab’), et dont l’essentiel est « condensé » en vidéo ici (toujours sur Ideas in science)...

Vu aujourd’hui les première et deuxième parties. Diffusion en cours, j’attends de tout avoir vu...
Au fait, faudra que je pense à partager une liste des chaînes que je suis si ça vous intéresse, à l’occasion (beaucoup de YouTube :/ mais contenu généralement de qualité).

Oh allez ! ça passe tout seul... =)

 
 

Sorry we missed you
Sorry we missed you

Sorry we missed you, film de Ken Loach, 2019

Effet Shangri-La. M’a un peu énervée.

So, what’s the point Sir Loach ?
Le « monde du travail » tant vanté si longtemps comme moyen d’épanouissement et d’amélioration sociale est devenu une jungle violente où chacun se démène pour ne pas sombrer. Jusqu’où peut-on aller ? C’est gentil de poser la question, mais est-elle encore si pertinente quand on fait face aux épidémies de burn-out, dépressions et suicides relayés dans les médias, ou vécus par nos proches ou personnellement, depuis de nombreuses années ? À part quelques déconnectés du monde qui n’iront de toute façon sans doute pas voir ce film, qui pense-t-il déniaiser ? Il suffit d’ouvrir ses yeux, ses oreilles. En Angleterre c’est pas terrible en effet, en France pas beaucoup mieux, pas sûr non plus au Maroc, au Bengladesh, au Vietnam, aux États-Unis ou en Chine. Uberisation, esclavage moderne, à différents niveaux, ça reste de l’esclavage quand même. Vive la mondialisation. Et voyez, vous les nantis qui arrivez encore à respirer, estimez-vous heureux ! C’est ça que ça veut dire ? Malheureusement c’est peut-être comme ça que certains le prendront. « Oh ouf, on en est pas encore là » dira une cadre, un joli dimanche ensoleillé sur sa terrasse en teck, le portable sur les genoux pour finir les dossiers de la semaine précédente ou essayer de prendre un peu d’avance pour la suivante, histoire de rester à peu près à flot et éviter une humiliation qui frappera quelqu’un d’autre. Et là je repense à tous ces gens se disant outrés (et le sont sans doute sincèrement) devant le scandale des salariés d’Amazon (remplacez par le nom de société multinationale de votre choix y’a des chances que ça marche), et qui foncent sur Amazon.com à la première nécessité impulsive « parce que tu comprends, quand même, c’est pratique ». Ben non justement, là, je comprends plus. Ou alors à paraphraser Einstein, y’a que deux choses infinies... c’est pas avec des raisonnements comme ça qu’on va réussir à faire face à ce qui se profile (de plus en plus près). Peut-être serait-il pertinent de commencer à nous interroger et sortir les doigts du cul (oui, là je deviens colère). Des années d’infantilisation semblent fonctionner, et certaines personnes semblent plus promptes à se battre pour des choses essentielles comme le netulla que pour d’autres. On en est là. Au moment où des gens tout ce qui a de « normal » n’ont plus d’autre objectif que d’essayer de sauver comme ils peuvent leur seul support affectif. Le seul truc qui les aide à tenir. Comble du cynisme, c’est encore du poison (non, pardon, le comble du cynisme est détenu par Bayer qui s’offre le commerce lucratif le plus apte à lui assurer en plus des débouchés économiques auto-entretenus. Ça c’est du business plan !).
Ou alors est-ce moi qui ai une vision bien sombre mais pourtant, il me semble, tout à fait réaliste de la situation actuelle qui se dégrade depuis déjà bien trop longtemps, et qui suis déniaisée...
Je pensais que cet état de faits était intégré depuis longtemps. Apparemment pas.
Précision tout de même : je ne condamne pas la totalité du monde du travail, mais une trop grande partie me semble répondre au signalement. Heureusement, oui, il existe des humains réunis autour de projets qui ont du sens, qui ont réussi à obtenir les moyens d’avancer, et qui le font dans une atmosphère respectueuse et pleine d’enthousiasme... ce qui ne les empêche pas de bien fonctionner, comme quoi c’est possible. Mais encore trop rare.
Alors qu’est-ce qu’on fait maintenant.

Retour au film... Rien d’ébouriffant sur la forme, quant au fond, plutôt creux, je m’interroge sur une quelconque « utilité ». Y’a guère qu’à Cannes qu’on semble s’en être ému, et je n’ai pas vu de réflexion sociale naître de cette œuvre appartenant déjà semble-t-il au passé dans le flot continu de la production cinématographique. =(

 

 
  • lundi 18,
Papicha
Papicha

Papicha, film de Mounia Meddour, 2019

Des moments de grâce, l’énergie de l’insurrection, de la résistance à l’oppression, du désespoir face à la barbarie, puis plof, ça se met à tourner à vide et à d’autres moments cette magie disparaît, ne réussissant à surmonter les écueils de l’écriture ou du montage de lourdeurs qui sonnent d’autant plus faux que le reste sonne juste. Film inégal, parfois vraiment excellent, qui justifie à mon sens tout de même d’aller le voir.

 

 
  • mercredi 20, subtilité et demi-teintes
Ne croyez surtout pas que je hurle
Ne croyez surtout pas que je hurle

Ne croyez surtout pas que je hurle, film de Frank Beauvais, 2019

À travers ces chroniques individuelles et à la première personne du singulier, c’est la société [14] française qui s’interroge, entre dépression et angoisse, doute et lucidité, immobilité et impuissance.
Dense d’images tirées des nombreux films que l’auteur a visionnés en l’espace de quelques mois comme symbole des accumulations qui remplissent nos vides et nous rassurent, d’idées et de constats sur l’état actuel du monde, le texte dit d’une voix monocorde et juste qui maintient la distance nécessaire avec toute sensibilité excessive qui ici confinerait à un épanchement inapproprié, l’ensemble propose le spectacle hypnotique de la psyché humaine en proie à un désespoir justifié et sincère. Heureusement le film se termine par une pointe d’optimisme mue par la solidarité et l’amitié, peut-être seul réel remède.
Effrayée au départ par un discours qui me semblait vaniteux et pédant, la suite m’en a détrompée pour me laisser porter par cette expérience et je ne le regrette pas.
À nouveau le recours à cette « écriture sans écriture » cinématographique, qui illustre ici à mon sens le bocal fermé où cohabitent la société et ses représentations, sans que l’on sache plus qui des deux nourrit l’autre et donne, en plus du reste, de sérieux biscuits à la réflexion. Miroir mon beau miroir.
Un film assurément à ne pas louper si vous n’êtes pas en ce moment en phase dépressive aigue, victime de migraines ou en dette de sommeil avérée. Beaucoup aimé.

 

Louange de l'ombre
Louange de l’ombre

Louange de l’ombre, essai de Jun’ichirô Tanizaki, Éditions Philippe Picquier, 1933, 2017 pour la présente traduction de Ryoko Sekiguchi et Patrick Honnoré

Superbe. Je ne peux qu’en recommander la lecture. Traité d’esthétique passionnant (d’autant plus si l’on s’intéresse comme moi à la photographie, mais aussi à la littérature, au cinéma bien sûr, à la sculpture, l’architecture ou encore le design), il s’agit aussi là, assez ironiquement, d’un essai sur la culture et la société, entre tradition et modernité, rupture et évolution, d’une redoutable actualité... épaisseurs mythologiques selon Tanizaki ?
En bonus, la formidable préface de la traductrice que j’ai d’autant plus appréciée en tant que post-face (peut-être étais-je aussi trop fatiguée lors de la première lecture pour l’apprécier à sa juste valeur ?)

Avant que j’oublie

 

 
  • lundi 25, ciné entre filles
Matthias et Maxime
Matthias et Maxime

Matthias et Maxime, film de Xavier Dolan, 2019

Après Mommy, que j’avais beaucoup aimé et trouvé très novateur dans la forme, Juste le fin du monde, qui m’avait saoulée entre pathos et brailleries, et au début de cette année Ma vie avec John F. Donovan, que j’ai bien aimé sans le trouver exceptionnel, Matthias et Maxime... En relisant ma précédence note, je me rends compte à quel point je ne sais sur quel pied danser, film après après film, avec Xavier Dolan. Matthias et Maxime est de son temps. Filmé de façon très moderne. Dynamique. Un montage vraiment brillant. L’essentiel se laisse percevoir et deviner entre ce qui n’est ni dit ni montré, tout en subtilité. À tel point que j’ai pu penser à certains moments à Bergman... Du très bon pour un film maîtrisé de bout en bout, autour d’une thématique souvent abordée par Dolan [15], mais jamais encore — je crois — aussi bien. Beaucoup aimé.

 

 
  • mardi 26, « reportage »-ciné
Camille
Camille

Camille, film de Boris Lojkine, 2019

L’univers de la photo, l’approche d’un regard, forcément ça me parle, même si je reconnais que je ne connaissais pas Camille Lepage avant de voir le film (qui a donc à mes yeux déjà le mérite de cette découverte). Celui d’expliquer assez clairement le conflit en Centrafrique aussi, qui m’était resté très nébuleux. Puis la rencontre avec une belle personne que ce personnage conçu autour de la personnalité de la photographe. Je n’ai pas toujours été convaincue par la prestation de l’actrice, Nina Meurisse, ni pas les qualités propres du film ou encore la rigueur des détails factuels et de la chronologie. Mais film que je recommande cependant pour l’incursion dans le milieu du reportage de guerre avec cette vision profondément humaniste.

Pour découvrir le travail de Camille Lepage, qui lui continue à vivre :

 

 
  • mercredi 27, sous les couvertures...
Blankets
Blankets

Blankets, roman graphique de Craig Thompson, Éditions Casterman collection Écritures, 2005

Réaction inconsciente à l’autre lecture en cours ? ^_^ (voir ci-dessous)
Pensant toujours avec un peu de magie dans les yeux à son chef-d’œuvre Habibi (un chouette truc à (s’)offrir par exemple, tiens...), et tenant Craig Thompson en haute estime, ça fait longtemps que je reluquais ce Blankets sur mes étagères. Encore une histoire de moments. Là c’était parfait !
Poésie, beauté, entre introspection et bien sûr universalité (heureusement pas toujours, ce n’est pas à souhaiter en tous cas). Un récit auto-biographique délicat qui embrasse les terreurs de l’enfance, l’impuissance, le dogmatisme, l’intégration sociale, le premier amour, le temps (oui, rien que ça). Comment faire pour supporter un monde trop rugueux quand on a une sensibilité à fleur de peau... Superbe.

 

 

 
  • samedi 30, sinon c’est bien aussi les couvertures, non ? Non. Définitivement pas. =)
Comment tout peut s'effondrer
Comment tout peut s’effondrer

Comment tout peut s’effondrer, essai de Pablo Servigne et Raphaël Stevens, Éditions du Seuil, 2015

Puisqu’Absol dit que s’il ne fallait en lire qu’un ce serait celui-là... pourquoi pas =) Ça tombe bien, il est dans la pile à lire (non ce n’est pas un étai) depuis un certain temps, le moment est donc venu de nous rencontrer. C’est parti ! (tout en conservant la distance nécessaire à de l’esprit critique surtout quand la thématique est susceptible de titiller l’émotionnel [16]).

Donc... il ne faut pas désespérer, à partir de la page 200 on commence à apercevoir un timide rayon de soleil... ^-^
Blague à part, lecture qui secoue, même si le bon sens ou l’instinct orientaient depuis longtemps vers un chemin plus respectueux de l’environnement, des autres et de soi-même. Parce que là on rentre dans les détails. C’est étayé. Peut-être un peu trop (429 notes et références bibliographiques que, j’avoue, je ne suis pas allée vérifier). À la limite peu importe la précision absolue des détails. Ce qui compte, c’est ce qui nous pend au nez, le monde dans lequel les changements qui se profilent (dont certains sont déjà bien présents et constatés) vont / sont en train de nous projeter, que ce soit demain (au sens propre ; ceci n’est pas une figure de style) ou dans un, deux, cinq, dix ans [17]... que l’on y soit préparés ou pas. Mais attention, au-delà des Cassandre que l’on ne veut entendre, ce livre insiste bien sur le fait que notre vie va changer, certes, mais pas forcément pour plus mauvais : la fin d’un monde, le capitalisme industriel mondialisé et financé par la dette. Franchement... une si grosse perte ? Alors perte du confort que nous connaissons actuellement (en tant qu’occidentaux bien lotis), c’est une certitude ; mais malgré les peurs, à l’aune de mes toutes petites expériences de bivouac un peu « roots », je pense sincèrement qu’on a la capacité de s’adapter à beaucoup de choses, et très rapidement (et de s’en sentir d’autant mieux). [18] Au point de « parfois » penser que le confort est l’opium actuel dans les vapeurs duquel nous masquons la perte de nos libertés [19]. Parce que soyons bien clairs... ce monde-là permet-il encore à l’être humain de s’épanouir réellement ? Le défi est alors lancé : dans quel monde voulons-nous vivre, avec les ressources dont nous disposons et disposerons. Quel(s) monde(s) souhaitons imaginer, créer, agir ? Ces mondes-là ne sont pas forcément ceux que l’on s’était imaginés en premier ressort. D’où le choc, le deuil de certains rêves, certaines représentations. Mais il ne tient qu’à nous d’en sortir le meilleur.
Cet avenir-là, très probable (de plus en plus devant les multiples constats d’inertie), n’est cependant pas daté, comme précisé plus haut. Il ne s’agit pas non plus de s’empêcher de vivre dans son attente. Bien au contraire ! Mais s’y préparer sereinement peut être une bonne option. S’orienter en conscience vers des horizons de transition. De superbes initiatives existent déjà, d’autres projets sont en développement. À nous d’être curieux, imaginatifs et créatifs pour un monde de demain (au sens figuré) qui donne envie !
En somme, rien ne sert de paniquer, juste se préparer à un monde meilleur qu’il nous reste à construire ensemble =)

En complément

 

 

[1Oui, certes, il en faut de toute façon pas beaucoup pour attiser ma curiosité, après, c’est surtout un problème de gestion du temps, n’hésitez pas d’ailleurs à me contacter si vous avez la solution à ce problème majeur de l’existence — en tous cas la mienne, mais je suis persuadée ne pas être seule dans ce cas... (la journée de 84 heures ?)

[2lieu ou non-lieu

[3France Musique, à retrouver sur son site internet ou tout simplement sur la fréquence de chez vous !

[4J’ai envie de dire que ce n’est même pas l’objet de la lecture ici.

[5au passage je suis preneuse si vous connaissez

[6réserve de cartes que l’on constitue au fil du jeu et duquel on fera sa main pour la manche de jeu

[7oui, ceci est un appel manifeste à qui de droit pour me faire inviter à une nouvelle partie

[8bien sûr, moi aussi

[9mon propos ici n’est surtout pas de juger : en tant qu’Occidentaux nous sommes certes globalement débarrassés de l’oppression directe et des simples questions de survie au jour-le-jour, mais cette situation nous met en position de réfléchir aux enjeux à plus long terme, qui engagent autant de questions de survie, sur d’autres plans...

[10à signaler pour des Américains évoquant le nazisme

[11Oyez oyez ! esprit critique n’empêche pas ouverture d’esprit, bien au contraire !! tout dépend comment l’on s’en sert... :-P

[12attention, casse-croûte

[13elle aussi sur YouTube

[14une certaine société ?

[15qui doit encore mettre mal à l’aise : aucun homme dans la salle ce soir-là ^^

[16un émotionnel déjà bien préparé par une intuition qui traîne de longue date

[17voire demain et dans un an, et dans deux ans, etc... : l’évolution globale sera probablement assez lente, avec peut-être le surgissement de quelques crises ponctuelles

[18Et ce ne sera très certainement pas l’Attaque-zombies non plus ;)

[19sûrement plus par des mécanismes sociologiques et psychologiques complexes et auto-alimentés que par les action concertées de gros vilains-méchants, quoiqu’il y en a aussi sans doute quelques uns

Première mise en ligne 5 novembre 2019, dernière modification le 12 juillet 2020

LR CC by-nd

La discussion est ouverte !

modération a priori

Attention, votre message n’apparaîtra qu’après avoir été relu et approuvé.

Qui êtes-vous ?
[Se connecter]
Ajoutez votre commentaire ici

Ce champ accepte les raccourcis SPIP {{gras}} {italique} -*liste [texte->url] <quote> <code> et le code HTML <q> <del> <ins>. Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.