ReTuna, Hugo Boss et l’économie circulaire
... ou un centre commercial pour apprendre à consommer mieux
ReTuna est le premier centre commercial au monde entièrement dédié à l’économie circulaire.
Des boutiques élégantes, qui vendent des objets bien présentés et uniquement de seconde main, recyclés ou « upcyclés » [1], et prouvent la rentabilité [2] d’un tel modèle même dans notre système économique actuel,
mais aussi un centre de formation pour apprendre à réutiliser l’existant et le mettre en valeur,
un centre de conférence ouvert à tous les sujets climato-intelligents pour renforcer les compétences et la prise de conscience grâce à l’éducation environnementale,
et un centre de collecte, de tri et de revalorisation des objets et matériels rapportés par les habitants.
Plus qu’une simple expérience, une initiative aujourd’hui primée, un modèle dont s’inspirer et à partager pour penser et agir l’évolution de nos modes de consommation.
C’est aussi un lieu de vie, une aventure humaine positive et utile qui donne à chacun la satisfaction d’œuvrer à l’avant-garde du développement durable.
Visite.
ReTuna, c’est quoi ?
Après en avoir beaucoup entendu parler par des entrefilets sur le net, le moment d’approfondir... En vrai.
Jeudi 19 Septembre, 10h30, parking de ReTuna, Eskilstuna [3].
De l’extérieur, un centre commercial comme beaucoup : un vaste entrepôt de métal et de béton posé sur un parking bitumé de périphérie, avec ses portes coulissantes en verre et sa large enseigne. Quelques indices comme d’importantes ouvertures destinées à faire entrer la lumière naturelle, la pelouse devant, le parking à vélos, la terrasse en bois ou le commerce qui s’organise juste à côté (on y reviendra) laissent cependant supposer le contraire.
En effet, dès la porte franchie on comprend que c’est une autre musique qui se joue. Dans le hall d’entrée, un magnifique bouleau de récupération nous accueille. Avec ses branches de bois nu et son feuillage de feutre écru illuminé d’une lumière douce, et au pied duquel on peut s’assoir sur un banc uniquement constitué d’anciens accoudoirs. Le ton est donné : ici on récupère, on transforme, on enjolive, on met en valeur, dans une ambiance claire et chaleureuse, à la cool, tout en dressant comme ce totem l’environnement et le vivre ensemble au centre des préoccupations. Bienvenue à ReTuna (de « Re- » pour un nouveau cycle et « Tuna », diminutif d’Eskilstuna). Le décor est simple : béton ciré, murs blancs ouverts par de nombreuses vitres et une verrière sur le toit qui permettent de profiter de la lumière du jour, les espaces boutiques sont délimités par de grandes parois de verre et quelques cloisons simples où le regard circule aussi librement que les idées. L’endroit est spacieux (mais on ne se sent pas perdu), attractif, agréable, d’un chic basé sur la simplicité suédoise qu’on retrouve par exemple chez la grande enseigne de mobilier en jaune et bleu (l’effet cage de Faraday en moins). Ni musique trop forte ni programmes radio ou messages publicitaires abrutissants, pas de réverbération sonore malaisante, pas de lumière électrique agressive. On s’y sent bien. C’est une énergie saine qui circule, des odeurs agréables, on s’entend, on communique, les sourires ont l’air naturel, bien campés, et le mot bienveillance ne paraît pas sortir d’un manuel de manipulation où il semble pourtant avoir doucement glissé.
Mais en parlant de bonne odeur, je laisse pour l’instant le rez-de-chaussée et ses trois boutiques pour me rendre à l’étage, par un large escalier (escalier, pas escalator... le bâtiment a bien sûr été pensé pour économiser l’énergie ), et rejoindre la cafétéria en mezzanine. Juste après la coursive et la porte de l’ascenseur, bien pratique quand on ne peut emprunter l’escalier, Returama, dans son décor sobre et accueillant propose un service de boissons et de petite restauration (saine et locale) et offre un coin sympathique pour se retrouver, où se poser tranquillement comme je le fait quelques minutes avec un excellent café (bio et équitable), en intérieur ou, lorsque le temps est agréable, sur la fameuse terrasse en bois repérée tout à l’heure.
Parée pour l’exploration. La première personne que je rencontre, c’est Anna-Maria, qui s’occupe de l’atelier Recycle Design de la folkhogskola (école du peuple, ou populaire) d’Eskilstuna. Juste à côté, l’espace de conférence. Mais on y reviendra un peu plus tard. Pour l’instant, direction les boutiques.
Expérimenter - Tester - Apprendre - Prouver
Il faut savoir que ReTuna répond à une règle simple : tout ce qui y est vendu est soit recyclé ou réutilisé, soit a été produit de manière biologique ou durable. La seconde règle d’or insufflée par Anna Bergström, directrice de cette galerie et qui a commencé sa carrière dans de grands centres commerciaux traditionnels avant de ressentir un ras-le-bol face au gaspillage éhonté : « Fais-le comme Hugo Boss » [4]. Car malgré ses particularités, nous sommes bien dans un centre commercial, qui répond aux « lois du marché » (tout en intégrant aussi une part d’économie sociale et solidaire), et l’objectif est clair : prouver que l’économie circulaire peut fonctionner et s’avérer rentable en s’insérant dans notre système économique actuel, et faire ainsi évoluer les mentalités et les habitudes de consommation en montrant qu’il est possible d’envisager une consommation plus respectueuse et responsable.
Les douze boutiques et les deux stands « pop-up » actuellement recensés, tous spécialisés, offrent un choix conséquent d’équipement, que vous cherchiez du mobilier, des articles de décoration, des vêtements, des chaussures, des biens électroniques ou informatiques, des vélos et autres articles de sport, des articles pour le jardin, ou encore pour les animaux de compagnie [5]... Et en plus, vous trouverez des conseils, produits ou services pour réparer et prolonger la durée de vie de ce que vous possédez déjà. Enfin, à côté de la sortie on trouve un concept intelligent autour des cartons de déménagement.
Les boutiques ont chacune leur identité propre, et toutes sont tenues par des travailleurs indépendants. Mon appareil à la main et mes questions, j’ai par ailleurs toujours été accueillie par des sourires, l’ouverture, la disponibilité, et des explications.
Maria, la fleuriste d’Ecoflor, met tout en œuvre pour que son lieu soit une bulle verte au milieu de ce centre commercial d’un nouveau genre, qu’on pourrait dire vert, en tous cas en recherche d’un plus grand respect de l’environnement. Elle m’apprend que chaque boutique a une liste d’objets « recherchés » transmise au centre de tri, qui en tient compte pour remplir le casier respectif de chaque commerce. À chacun alors de voir ce qui lui convient et qu’il transformera ou réutilisera. Ce qui ne l’intéresse pas ira alors dans un casier commun où tous peuvent se servir. Elle utilise beaucoup ce casier, car pour les transformations qu’elle fait elle n’a pas besoin que les meubles soient parfaitement fonctionnels, ou les objets de décoration en parfait état. C’est ainsi qu’une veste de cuir irrécupérable en vêtement devient le nouveau matériau d’un cache-pot en forme de pomme de pin. Elle vend un peu de tout dans son îlot de verdure, et ça reste cohérent avec un esprit, une énergie... son identité. page Fb [6]
Ma rencontre avec Mouheddin de la boutique d’informatique re:Compute-IT me marquera elle aussi longtemps. Son collègue Amjad qui s’occupe plus de la vente et de la partie logicielle a pris un congé exceptionnel : son bébé est né hier. Lui d’habitude est dans l’atelier, il répare. Leur activité est tournée vers la vente d’un matériel récupéré bien que souvent récent et en bon état, mais aussi vers les interventions, réparations, « upgrade » [7], accompagnement, formation... Ils organisent régulièrement des opérations pour sensibiliser le public à la nécessité d’un entretien logiciel et matériel régulier pour que celui-ci conserve de bonnes performances. Il me montre l’écriteau de garantie, en six langues : suédois, arabe, turc, anglais, espagnol, et une dernière que ni lui ni moi ne reconnaissons. Comme son collègue, il est originaire de Syrie. Lui est venu avec sa famille, il y a cinq ans, et travaille dans la boutique depuis deux ans. Ses silences et son regard laissent cependant deviner un long parcours qu’il préfère recouvrir d’un sourire pour mieux penser à l’avenir. Aujourd’hui il paraît heureux. Fb
Dans la boutique d’à-côté, Studio Sanjaki, un couple de Chrétiens d’Irak du nord, installé en Suède depuis une quinzaine d’années, venu pour rejoindre son frère à lui. Une longue histoire là encore. Une longue histoire pour tous. Ici c’est la boutique de Nour, qui utilise ses talents de décoratrice à fabriquer des coussins à partir de vieux jeans et retaper des meubles défraichis en de superbes pièces ; c’est souvent son mari qui répond aux questions. Elle le laisse faire avec malice. Avant elle travaillait dans l’industrie. Elle a arrêté pour ouvrir cette boutique et se sent bien plus épanouie maintenant, me dit-elle avec un plaisir non dissimulé. Elle a les yeux qui pétillent quand elle montre ses créations à ses clientes. Fb
Un peu plus loin le coffre à jouets de la toute jeune Hiba, à l’Angelinas Barnbutik, propose jeux, jouets, peluches et déguisements, ainsi qu’un parc important de poussettes et autres articles de puériculture. Elle aussi est arrivée de Syrie avec sa famille. Cette boutique est son premier boulot, et elle semble très bien se débrouiller.
En Suède, un programme d’État subventionne les salaires des nouveaux résidents pendant deux ans, histoire de se lancer. Elle est en tous cas radieuse.
Et puis il y a la boutique toute blanche au fond à gauche. Re Moda propose des articles de décoration, bijoux fantaisie et ustensiles de cuisine (et beaucoup d’articles blancs). Tenue par deux sœurs, Anita et Eva ont toutes deux lâché leur boulot à plein temps pour ouvrir cette boutique et s’y relayent. Elles ont ici l’impression de participer à quelque chose de réellement important. Comme les autres, elles ont connu une première année et demie assez dure, mais une fois passée, elles se disent aujourd’hui heureuses d’avoir tenu la barre et satisfaites.
Sans oublier la superbe boutique de vêtements « vintage » de Maja Alexina, Axelinas, délicieusement décorée, les habits triés par couleur, avec un goût assuré. En plus des vêtements, qu’elle recoud, répare et transforme pour les vendre, elle propose un service de retouche et de réparation à sa clientèle, et des articles de mercerie pour faire soi-même. Elle aussi est fière du chemin parcouru malgré les difficultés de la première année et demie. Elle est heureuse d’être là, d’apporter sa pierre à l’édifice. Même si me dit-elle l’idée a encore du mal à faire son chemin. « Les gens d’Eskilstuna ne voient pas la différence entre ce qui se passe ici et les « free-markets » qu’ils ont à côté de chez eux. » La clientèle vient majoritairement des grandes villes dans les 100km alentours : Stockholm, Örebro, Västerås... la rançon de l’avant-garde, qui illustre bien la nécessité de la communication, de la sensibilisation et de l’éducation.
En tous les cas ReTuna prouve que ce modèle économique circulaire fonctionne, et bien ! En espérant que cet ultime argument saura motiver les plus réticents.
C’est justement là que j’ai rencontré Anna, la directrice du centre commercial. C’est une personne d’un dynamisme impressionnant. Pressée mais très ouverte, elle s’est prêtée avec une grande gentillesse au jeu des questions, qu’elle pratique régulièrement auprès des nombreux visiteurs (journalistes comme touristes), souvent venus de l’étranger, curieux comme moi de voir, découvrir et comprendre cette initiative prometteuse qu’elle a rejoint en janvier 2015. Un projet qui est arrivé au bon moment dans sa vie. En effet, elle a démarré sa carrière dans les temples du consumérisme moderne, sans doute analyse-t-elle en réaction à l’éducation de parents sensibles au commerce éthique et durable et rejetant le consumérisme... Avant de s’interroger à son tour, la maternité venue (quatre fois), sur ce monde du tout jetable dans lequel ses filles grandissaient, entre identité de marque, influenceurs, télé-réalité et Insta... « Je me suis rendue compte que je devais devenir un modèle pour mes enfants et faire quelque chose de bon pour la planète. » [4] Espérant que ce qui fonctionne pour sa famille puisse s’élargir à la société suédoise dans son ensemble en l’encourageant à l’action, elle voue son énergie et son enthousiasme à ce que ReTuna soit un exemple, une étincelle, un élan fondateur.
L’étage compte en outre une librairie, Eva’s Bokhörna, un espace dédié au mobilier et à la décoration, ReTuna Design, et une boutique de vêtements avec une ligne moderne, For You.
En bas, les salariés de l’association AMA (Aktivitet Motivation Arbete, en français Activité Motivation Travail) proposent du mobilier et d’autres articles pour l’extérieur qu’ils ont fabriqués à partir de matériaux de récupération : salons de jardin, bancs, haies en bois, nichoirs, bougeoirs, luminaires, décoration, planches à découper, des articles pour organiser l’atelier, du petit bois de chauffage... dans une ambiance à la fois appliquée et détendue.
Des vélos débordent de la boutique de Toni, judicieusement nommée ReBuyke, où les nombreux articles de sport passent de mains en mains et de pieds en pieds à mesure que ceux de leurs anciens utilisateurs grandissent ou passent à autre chose, et quelques outils de jardinage (c’est aussi un sport non ?) attendent le retour des beaux jours. Fb
Enfin, la boutique d’Eskilstuna Stadsmission, l’une des dix missions municipales de Suède. C’est un organisme à but non lucratif qui, en coopération avec la municipalité d’Eskilstuna et le pastorat, a pour objectif de venir en aide et soutenir individuellement et respectueusement les personnes en situation vulnérable, en répondant à leurs problématiques de logement, d’alimentation et d’autonomie vers une vie meilleure et une société plus humaine. La mission fonctionne uniquement grâce aux dons de particuliers, de paroisses, d’associations, de sociétés, de fondations et elle mène une politique dynamique en matière de collecte de fonds. Fb
Stadsmissioned Second Hand, la boutique donc, en fait partie, puisque tous les bénéfices vont bien sûr directement à la mission. Elle propose un large choix de mobilier, vaisselle, décoration, habillement, livres, cd, dvd, jouets ou linge de maison, revalorisés par les personnes qui y travaillent, et y ont été préalablement formées.
De retour dans le hall, je rencontre Hans, un client qui habite Eskilstuna et vient voir un ami travaillant ici. Il est venu 4-5 fois acheter à ReTuna. Il trouve le concept génial lui aussi. Mais pour l’instant, il apporte surtout des choses à recycler. Il faut qu’il revienne. Les parents morts il y a une quinzaine d’années, les maisons qu’il faut vider, les choses qu’on entasse à la cave, au grenier, dans un garage, qui y pourrissent inutilement.
Enfin, juste à côté des portes d’entrée, le stand de ReBox propose un concept innovant autour des cartons de déménagement : l’entreprise vient collecter gratuitement les cartons devenus inutiles, les reconditionne, puis les revend, livraison incluse à ceux qui en ont besoin. La création de cette pourtant simple chaîne logistique évite d’avoir à fabriquer sans cesse de nouveaux cartons alors que d’autres seront traités en déchets après n’avoir souvent servi qu’une seule fois, mal entreposés, abimés ou mouillés, ce qui permet de faire des économies significatives à la fois en termes d’argent, d’énergie et de ressources (fabrication et traitement, le transport local se faisant avec des véhicules plus écologiques). Fb
En complément, l’équipe de ReBox se déplace pour des campagnes de sensibilisation et des conférences sur l’économie circulaire et le développement durable dans les environs, et participe ainsi de l’effort d’éducation en dehors de ReTuna.
Comme dans n’importe quel autre centre commercial, les commerçants payent un loyer (dans les prix du marché, assez cher apparemment), qui inclut le matériel de récupération et couvre les frais de fonctionnement. La galerie est ouverte 7j/7 (de 10h à 19h du lundi au vendredi et de 10h à 15h le samedi et le dimanche), et à part quelques jours fériés (environ 11 jours par an), les commerces ont l’interdiction de fermer. Un rythme assez dur à supporter, tant physiquement que côté vie familiale. D’autant plus qu’en effet la première année, année et demie, ne permet pas encore de dégager un revenu suffisant pour rémunérer une personne de remplacement un jour ou deux par semaine. Cela occasionne donc beaucoup de travail et de fatigue. Un lourd tribu à payer. Mais une fois ce cap passé, tous ceux que j’ai interrogés m’ont dit être heureux d’avoir tenu le coup. Ils aiment ce qu’ils font, et sont fiers de participer à ce projet, de faire partie des précurseurs, de contribuer au développement d’une idée, d’un concept qui correspond à leurs valeurs, leur apporte la satisfaction du sentiment de se trouver à l’avant-garde.
L’envie de partager cette expérience est un moteur bien réel. Et d’après ce que j’ai pu constater [8] le turn-over des boutiques est relativement faible.
Tous les premiers lundi de chaque mois est organisé un #CrazyMonday, une journée de soldes sur certains produits et des visites guidées dans les coulisses. D’autres animations viennent régulièrement compléter un agenda bien rempli : journées thématiques et animations ponctuelles, comme des défilés de mode, des visites de la galerie, de l’entrepôt et des coulisses, des conférences sur l’économie circulaire (notamment avec ReBox), des expositions d’art « Recycle Design », des concours de projets climato-intelligents, des opérations de réparation de vêtements, un festival du développement durable (Hållbarhetsfestival), etc.
Et pour contrer le « BlackFriday », les équipes de ReTuna ont bien sûr fait partie des premiers à rejoindre le mouvement « White Monday », qui a lieu le lundi précédent (voir encadré).
Car ReTuna est plus qu’un simple centre commercial. Il vise également à devenir un éducateur public, en organisant ces événements, ateliers, conférences, des journées thématiques et bien plus encore, autour du développement durable. L’école populaire Eskilstuna Folkhögskola organise son programme d’éducation d’un an intitulé « Recycle Design - Återbruk » dans ses locaux. Des salles de conférence et de réunion sont également disponibles.
Former - Partager - Exposer
ReTuna abrite donc logiquement la branche « upcycling » de l’école populaire d’Eskilstuna. Dans le spacieux atelier, Anna-Maria m’en explique le fonctionnement. Les étudiants, des particuliers adultes, paient environ 250€/an de leur poche et peuvent se former une année entière à plein temps ou à temps partiel. Le reste est financé par l’État suédois au titre de la formation personnelle [9].
Ce matin, onze étudiantes travaillent à leurs projets en cours et circulent entre la grande salle et les deux plus petits ateliers où sont regroupés les outillages spécifiques (bois et plastique, tissu et papier), consultent la documentation à disposition, échangent entre elles ou demandent conseil à Anna-Maria.
Dans ces formations caractérisées par la liberté et le volontariat, ouvertes et non formelles, elle enseigne par modules le travail des matériaux : comment les utiliser, recréer à partir de récupération, et comment utiliser son sens artistique, sa créativité et son inventivité dans la réutilisation.
On retrouve d’ailleurs un bel espace d’exposition dédié au Recycle Design qui se poursuit jusqu’à la salle d’accueil où se concentrent (et d’où débordent) les différentes animations et ateliers organisés pour partager l’expérience (Recycle Design bien sûr, mais aussi des ateliers « Fix the thing », ou pour cuisiner et conserver en « zéro déchet ») et ainsi aider à ce que le concept d’économie circulaire rentre dans notre quotidien tout naturellement.
Éduquer - Réfléchir - Avancer - Transmettre
Contigüe à cet espace, une grande salle permet d’accueillir des conférences et des réunions, qu’il est possible de réserver pour des thématiques climato-intelligentes. Annsofi Söderlund, coordinatrice, aide à leur préparation et leur organisation, et propose de les associer à des activités axées sur le développement durable, des ateliers et des rencontres, basées sur la convivialité et dans la bonne humeur, avec tout le matériel nécessaire à disposition.
Lors de mon passage, la salle était d’ailleurs occupée par une conférence suivie par une trentaine de personnes studieuses.
Fermer le cercle : le centre de recyclage ReTuren, valoriser les biens et aussi les personnes
Oui, c’est bien là le cœur de ReTuna : les biens et matériaux qui seront vendus dans le centre commercial une fois revalorisés proviennent tous directement du centre de recyclage situé juste à côté, dans le même bâtiment, et qui gère la collecte et le tri.
En effet, avant de jeter dans les bennes de recyclage, les usagers sont invités à déposer les choses dont ils sont venus se débarrasser, encore en bon état, réparables ou dont il est possible de retirer des matériaux, dans les différents espaces de collecte, où elles sont prises en charge par le personnel d’Eskilstuna Energi och Miljö (l’entreprise municipale chargée de la gestion de l’énergie et de l’environnement) pour être triées. Fb
Chaque commerçant dispose d’un casier où sont déposés les objets ou matériaux correspondant à sa liste de demandes, et où il vient puiser pour alimenter sa boutique. Ce qui ne l’intéresse pas ira dans un casier commun où chacun peut se servir selon ses inspirations. Enfin, ce qui n’aura pas été retenu dans ce casier sera soit donné à des associations si l’état est suffisamment bon, soit le cas échéant jeté et traité. En Suède, la quasi totalité des déchets est aujourd’hui recyclée, et le tri sélectif est un geste naturel et simple. Il est courant de trouver des poubelles et containers différents pour récupérer le plastique, le métal, le carton et le papier, le verre blanc, le verre coloré, les déchets compostables et enfin ce qui ne correspond à rien de tout ça (et représente une part assez minime). Eskilstuna ne déroge pas, et utilise un système de tri par couleurs (un type de déchet = une couleur de sac) facilitant le traitement par reconnaissance optique. La ville expérimente par ailleurs l’utilisation de larves de mouches pour optimiser le traitement du compost [10].
Avec ce cycle prolongé, les articles usagés continuent donc d’avoir une valeur économique. Réutilisés par ReTuna, cela conduit à une consommation plus douce, ayant moins recours à de nouvelles matières premières, et par conséquent réduit l’utilisation des ressources naturelles, la consommation d’énergie, les émissions de dioxyde de carbone, etc. Pour simplement produire avec les ressources que nous avons déjà.
Le projet a globalement permis la création d’une cinquantaine d’emplois pour l’instant, pour bonne part allouée à la collecte et au tri. Des personnes qui par leur travail réhabilitent des objets destinés au rebut, qui participent au développement d’un système plus vertueux et respectueux de l’environnement et des humains, et ont le sentiment que ce qu’ils font a du sens, est important.
Vivre ensemble
Une chaîne, ou plutôt une ronde qui soude et qui libère, entre les personnes qui rapportent ce dont elles n’ont plus besoin, celles qui trient et revalorisent, les commerçants qui sélectionnent, retapent, présentent et vendent, et les clients. Chacun apportant sa pièce à l’édifice. Et alors de repenser à Paul Fort, « si tous les gens du monde voulaient s’donner la main »...
Et ça marche.
En 2018, avec une fréquentation moyenne de 700 visiteurs par jour, ReTuna a réalisé lors de sa quatrième année un chiffre d’affaires de 11,7 millions de couronnes suédoises [11], environ 1,1 million d’euros. Les ventes sont bonnes, mais légèrement en deçà des prévisions. Un projet d’extension du centre à plus de 5 000 mètres carrés (contre 3 000 m2 aujourd’hui) reste en suspens jusqu’à ce que ces chiffres augmentent.
En effet, si la population sensibilisée aux questions environnementales et au développement durable a très rapidement adopté le « réflexe » ReTuna, et malgré tous les efforts déployés, le message peine encore à se frayer un chemin dans l’esprit du plus grand nombre. Sans prise de conscience massive, le contexte reste difficile pour le commerce de détail, même éthique et durable, concurrencé par le confort du commerce en ligne. Il faut du temps pour changer les mentalités. Mais il est possible de créer un commerce plus vertueux. ReTuna l’a prouvé.
De la médiatisation à la reconnaissance
Relayé sur la toile
Depuis son ouverture, de nombreux médias se sont fait l’écho du développement de ReTuna, en Suède comme à l’international (Earthbond Report, Konbini, Influencia, ConsoGlobe, Rfi, ...). La BBC, Huffington Post ou The Guardian ont même publié des articles beaucoup plus étayés, contribuant ainsi à une plus large visibilité de ce laboratoire et de son évolution.
Guinness World Records 2020
ReTuna a été référencé dans l’édition 2020 du Guinness World Records en tant que premier centre commercial au monde entièrement destiné aux produits réparés, recyclés et restaurés.
Placebrander of the Year 2019
Le 1er octobre dernier [12], le titre de « Placebrander of the Year 2019 » a été décerné à la commune d’Eskilstuna, la reconnaissant comme la ville industrielle la plus respectueuse de l’environnement au monde depuis 2016. Le centre commercial ReTuna, rendu célèbre entre autres par le Forum économique mondial, la BBC ou The Guardian, a à cette occasion une fois encore été cité en exemple. The Guardian a d’ailleurs nommé Eskilstuna « Capitale mondiale du recyclage ».
Le prix Placebrander of the Year a été créé en 2013 et récompense l’innovation marketing. Le concours est ouvert à tous les types d’efforts visant à renforcer l’attractivité d’un lieu. Les contributions sont évaluées sur la qualité de l’idée, sa mise en œuvre, sa durabilité, sa capacité de se démarquer et les effets constatés. Eskilstuna a remporté le prix Placebrander de l’année 2019 pour ses travaux sur le développement durable et le recyclage.
« C’est le prix du peuple, pas celui de la municipalité. Nous avons gagné parce que nous unissons nos forces dans le développement et la promotion de la ville avec le développement durable comme principe directeur », déclarait Martin Roos, directeur général de Destination Eskilstuna.
Le désir avoué dans la mise en œuvre de ce projet : favoriser l’émergence d’un endroit à échelle humaine, tourné vers ses habitants, et apprendre à évoluer pour répondre à l’un des défis les plus importants de notre époque et contribuer à un monde meilleur. [13]
La commune poursuit d’ailleurs ses efforts en participant par exemple à des projets pilotes en matière de gestion de l’énergie [14].
Social Change of the Year 2019
En mars 2019, Anna Bergström a été récompensée par le prix Social Change of the Year 2019 attribué par Veckans Affärer (le Business’s Week suédois) pour son implication dans le projet de ReTuna, prouvant qu’il est possible de sauvegarder l’environnement tout en gagnant de l’argent.
« Si nous ne changeons pas notre façon de consommer, le monde risque de s’effondrer. »
C’est à cette occasion qu’elle a annoncé fièrement avoir été contactée par les Chinois, qui aimeraient s’inspirer du modèle. « Ils pensent que le modèle ReTuna est fantastique, mais qu’il peut être encore meilleur et à une échelle plus grande. » [15] [16]
ReTuna confirme donc qu’en plus de trouver sa raison d’être dans un mode de consommation locale, il est devenu un pôle de réflexion et d’expérimentation à l’échelle mondiale sur l’économie circulaire.
Elle invite bien sûr tous les journalistes, influenceurs et décideurs à visiter sa galerie pour créer une émulation et permettre au concept d’essaimer un peu partout.
Contre le BlackFriday : #WhiteMonday
L’initiative suédoise White Monday est devenue un mouvement mondial de consommation circulaire.
Le White Monday a lieu le lundi qui précède le Black Friday, cette année c’était donc le 25 novembre.
Rendez-vous le lundi 23 Novembre 2020 !
Mais pourquoi attendre ?
Pourquoi ne pas commencer dès maintenant et préparer les cadeaux de Noël prochain en consommant de manière plus responsable ? =)
Plus d’info : whitemonday.info et pour partager sur les réseaux #WhiteMonday
Enfin, si vous vous sentez plus vert que blanc, il y a aussi le Green Friday, dont « l’ambition est de sensibiliser les Français à une consommation plus responsable ».
Et au passage, si vous avez envie de profiter du beau temps vendredi, Youth For Climate propose sûrement une balade près de chez vous ! Pis marcher c’est bon pour la santé...
youthforclimate.fr
C’est sorti d’où ?
Eskilstuna a longtemps souffert d’un problème d’image. Ville industrielle historiquement centrée sur la fabrication de l’acier, elle a en effet été largement éprouvée lors du déclin rapide de cette industrie dans les années 70 : fort taux de chômage, rues grises et infrastructures vieillissantes n’incitaient pas les habitants à s’installer ou même rester.
Sensibilisée par l’écologie, la municipalité a donc, dès 2007, commencé à réfléchir aux initiatives à mettre en œuvre pour faire d’Eskilstuna une ville où il fait bon vivre, respectueuse de l’environnement et plus humaine. Depuis 2012, les transports publics fonctionnent au biogaz et à l’électricité, et la ville utilise des centrales électriques à faibles émissions de carbone, qui utilisent l’énergie thermique issue de la production d’électricité pour chauffer l’eau. Les résidents classent leurs déchets en sept catégories multicolores à la maison. Dans ses travaux de développement liés à l’environnement, l’idée est venue d’ouvrir un centre commercial abritant des magasins « normaux », mais avec une gamme de produits réutilisés et recyclés. L’idée était en outre d’attirer un large public et de diffuser des connaissances sur le développement durable et l’économie circulaire. Les décideurs politiques locaux ont décidé de concrétiser cette idée. L’idée a été approuvée en 2012. La construction du projet a débuté en août 2014. La municipalité a investi 19,5 millions de couronnes suédoises (environ 1,84 million d’euros) pour les travaux de conversion du bâtiment et pour subventionner les frais de fonctionnement de la galerie pendant deux ans, et ainsi alléger les loyers des commerces le temps qu’ils se lancent. Le centre de tri ReTuren a été inauguré le 24 août 2015. Depuis lors, les habitants peuvent y déposer leurs biens usagés, qui viendront ensuite achalander le centre commercial. ReTuna Återbruksgalleria a ouvert ses portes au public le 28 août 2015, autour d’une grande fête axée sur le climat et de nombreuses animations. En 2018, pour la première fois, le centre commercial a fonctionné sans cette subvention et les commerces ont généré un chiffre d’affaires sur cette même année de 11,7 millions de couronnes suédoises (environ 1,1 million d’euros). Le projet a en outre généré plus de 50 nouveaux emplois.
ReTuna Återbruksgalleria et Retuna Återvinningscentral sont gérées par Eskilstuna Energi och Miljö (EEM). EMM est une entreprise municipale chargée de gérer de façon optimale les secteurs de l’énergie et de l’environnement. EEM travaille dans six domaines d’activité : réseau électrique, marché de l’électricité, eau et assainissement, recyclage, énergie, marketing et vente. ReTuna fait partie du secteur du recyclage. [17]
De l’inspiration à l’action
L’élan ReTuna (haha... )
Largement visité, on l’a vu, tant par des particuliers curieux que par des journalistes, des investisseurs et délégations venues du monde entier, ReTuna inspire et participe à la prise de conscience globale. Et devant la médiatisation grandissante de sa réussite, en parallèle de l’inquiétude de plus en plus palpable face à l’avenir, le phénomène ne fait que s’amplifier.
D’autres projets sont en cours de développement.
Un centre inspiré de ce modèle devrait ouvrir à Hamar en Norvège au début 2020, tandis que les autorités locales allemandes, japonaises et suisses ont toutes envoyé des représentants ici au cours des 18 derniers mois pour examiner la possibilité de faire quelque chose de similaire.
« Je ne peux pas en dire plus, car ces choses sont confidentielles », dit-elle. « Mais je suis sûr que cela se produira en Grande-Bretagne d’ici deux ou trois ans. »
Je pense que les gens commencent à comprendre que c’est important : si vous n’êtes pas durable à l’avenir — je veux dire en tant que communauté ou entreprise — vous ne survivrez pas. » [18]
Et en France on en est où ?
Rien de cet ordre n’est semble-t-il prévu. Cependant cela n’empêche pas d’autres initiatives de se développer et se répandre.
Du côté de l’État, le gouvernement déclare mettre l’économie circulaire au cœur de sa politique de transition énergétique et économique entamée il y a quelques années, au même titre que le « plan climat », le « dialogue environnemental », et le développement de différents leviers incitatifs pour faciliter l’émergence d’une économie plus responsable. [19] [20]
Effort semble-t-il largement insuffisant en regard des moyens qu’il faudrait réellement déployer pour obtenir des résultats significatifs (quoique... à en croire ma lecture du moment, l’inertie actuelle pourrait à terme résoudre d’un coup toutes les problématiques de retraite, de financement des services publics et d’inégalités sociales qui plombent actuellement la France — comme de nombreux autres pays).
Heureusement pas seul acteur. La société civile prend le relais, comme souvent, parfois soutenue par des collectivités locales conscientes des enjeux et capables d’offrir un soutien technique ou financier.
Le réseau Emmaüs bien sûr, acteur historique, se modernise et adapte ses structures aux outils actuels, avec Label Emmaüs, sa plateforme de boutique en ligne.
En complément, un réseau croissant de recycleries et ressourceries (le terme « ressourcerie » est officiellement une marque déposée par le Réseau National des Ressourceries [21]) se développe pour former un maillage de plus en plus serré, permettant à une part grandissante de la population d’y avoir accès localement. Malheureusement, la distinction entre les termes utilisés (ou possiblement utilisables en toute légalité) cache une différence dans la profondeur du traitement de valorisation des biens récupérés, les recycleries limitant souvent celui-ci à la réparation, un coup de propre et une remise dans le circuit. Ceux qui font plus que ça n’auraient théoriquement pas le droit de se nommer ressourcerie, alors que finalement il semblerait que l’on ne parle pas exactement du même type d’activité. [22]
Des initiatives souvent individuelles, associatives ou entrepreneuriales (en général dans le cadre d’une économie sociale et solidaire).
Dans le Finistère par exemple (6 733 km2 pour 908 249 habitants en 2016 [23]), assez dynamique dans le développement de ce type de projets [24], pas moins de 14 recycleries et ressourceries (et peut-être même plus ! la liste n’est sans doute pas exhaustive) ont d’ores et déjà fait le pari de la valorisation pour une économie circulaire.
Petit tour d’horizon :
Pays de Daoulas : Ribine, la recyclerie du Pays de Daoulas
Pays de Landerneau : Le Tri Porteur
Pays de Brest : Un peu d’R
Pays de Plouguerneau : Adimplij
Morlaix : Les Chiffoniers de la Joie
Pays de Carhaix : Ti Récup’
Pays de Quimperlé : Retritout
Pays de Concarneau : L’île O tri
Quimper : Treuzkemm, la Ressource qui rit
Pays Bigouden (sud) : Recyclerie La P’tite Boîte
Pays Bigouden (nord) : Cap Solidarité Plozévet
Crozon : Recyclerie des Papillons Blancs
Emmaüs Finistère Nord : Emmaüs Brest
Emmaüs Finistère Sud : Emmaüs Rédené
Mais parle-t-on bien de la même chose ?
Recycle Design & upcycling : une opposition entre les boutiques de ReTuna et les ressourceries ?
Il s’agit là plus d’une question de démarche que d’intitulé ou (à mon sens) de modèle économique. Ce qui marque la différence semble bien être là la création de valeur que constitue la réparation d’un objet, sa réhabilitation, sa transformation par un savoir-faire spécifique pour en faire un nouvel objet, plutôt que la simple transmission d’un bien usagé d’une main à une autre, qui certes ralentira la cadence, mais reste dans un mode de consommation voué à la poubelle.
Une démarche qui marque une évolution importante face aux problèmes de recyclage des matériaux une fois le « cycle de vie du produit », pourtant linéaire et bien trop court, arrive à son terme, et qui se propose de répondre au moins partiellement à ceux de l’accès aux matériaux mêmes, aux ressources pour fabriquer de nouveaux produits. Enfin ce système explore de « nouvelles » solutions face aux coûts énergétiques et financiers du transport des matériaux et des produits, puisque cette transformation s’effectue en général à l’échelle locale.
Cependant, ReTuna fait un pas de plus vers la promotion de cette économie circulaire.
Faute de financement des infrastructures, la plupart des ressourceries se trouvent dans des entrepôts, souvent froids et venteux, et rien n’est fait (ou ne peut être fait, soyons bien d’accord [25]) pour rendre ces endroits réellement attractifs, agréables, jolis. Comme le dirait peut-être Anna, on est loin d’Hugo Boss... Ce n’est pas un problème en soi, sinon que les efforts fournis en faveur de cette économie restent confinés à un circuit parallèle, animé et fréquenté par ses propres prêcheurs, ou aux populations économiquement contraintes à ce mode de consommation. Par le phénomène d’habitus [26] décrit par Pierre Bourdieu, qui influence les comportements individuels dans tous les domaines de la vie (loisirs, alimentation, culture, travail, éducation, consommation…), on aboutit rapidement à un cloisonnement, invisible mais bien réel, de deux mondes. Malheureusement conjugué à l’effet de démonstration décrivant la tendance d’un groupe social donné à imiter la consommation d’un groupe au revenu supérieur, induisant un accroissement de leur propension à consommer, c’est un monde plutôt que l’autre qui aurait spontanément la faveur du plus grand nombre.
Ce parallélisme ne remet alors nullement en cause le commerce traditionnel et son fonctionnement délétère (mode, collections, nouveautés, obsolescence programmée), puisqu’il n’atteindra jamais sa clientèle.
Fais-le comme Hugo Boss. »
Et c’est là que ReTuna fait la différence : en adoptant les codes de la consommation traditionnelle (son langage — centre commercial, boutique, cafétéria —, son aspect visuel — ressemblance patentée avec le fameux acteur majeur de la grande distribution jaune et bleu —, le confort des locaux, la qualité visuelle des objets, les efforts de présentation, l’individuation en petites boutiques spécialisées, la convivialité) tout en créant une dynamique d’envie et de plaisir, le centre commercial tend à casser cette barrière. Si une clientèle issue du circuit traditionnel passe les portes de ReTuna et y trouve du plaisir (peut-être même plus que des objets finalement...), c’est une clientèle acquise. La sensibilisation et l’éducation suivront (d’autant qu’à ReTuna tout est sous le même toit !).
L’erreur majeure, pour toucher la grande masse des consommateurs, est peut-être de considérer la sensibilisation [27] comme moteur au changement des comportements, avant le plaisir et l’accessibilité.
De plus, en France, le système des ressourceries et recycleries fonctionne principalement grâce au bénévolat. Aussi pourrait-il être pertinent de s’interroger, tant qu’on reste dans un monde basé sur le capitalisme, à quel point cette situation n’est pas un obstacle à une concurrence libre et saine et n’est pas destructrice d’emploi (un comble pour une économie plus sociale et solidaire).
Et par ailleurs, qui dit recours au bénévolat dit bien souvent horaires d’ouverture limités, donc une accessibilité moindre par rapport à des commerces plus largement ouverts.
D’un autre côté, on pourra opposer qu’une concurrence libre et saine dans une économie pourvoyeuse d’emploi a disparu depuis bien longtemps (et alors heureusement que des bénévoles sont là pour faciliter l’émergence d’une économie plus sociale et solidaire, même quelques heures par semaine).
Petites boutiques ici et là ou centre commun ?
On pourrait se dire que des boutiques comme ça, quelles que soient leurs formes, sont nécessaires un peu partout, pour répondre à un besoin au niveau local, un service de proximité.
Cependant, force est de constater qu’un tel système groupé est d’autant plus viable qu’il réunit et intègre la totalité d’un circuit logistique : lieu central d’accueil des objets amenés par la population, de tri, de transformation, de valorisation, et enfin de remise en circuit. C’est sans doute la conjonction de ces éléments qui le rend réellement efficace et offre alors un volume suffisant pour que chacun s’y retrouve, et y trouve chaussure à son pied, mine de rien facteur peut-être essentiel à la réussite sur le long terme d’un tel projet.
De plus, cet aspect logistique semble valide quel que soit le système économique : c’est une structure qui est proposée là. Il se trouve qu’elle fonctionne et arrive à trouver son équilibre dans le système capitaliste et consumériste actuel. Cela n’est pas exclusif d’autres systèmes à venir, à inventer ou qui s’inventeront d’eux-mêmes face aux nécessités futures. Rien ne s’opposerait à ce qu’il fonctionne par exemple dans un système socio-économique basé sur le don [28].
Entre les deux modèles, local et central, nous avons donc un point de conjonction essentiel : un seuil critique de volume. En d’autres mots, plus nous prendrons conscience du réel bienfait de l’économie circulaire et enverrons nos biens usagés vers ces centres de tri, plus nous offrirons de possibilités à ces objets de trouver une nouvelle vie et plus nous aurons nous-mêmes de choix lorsque nous voudrons nous approvisionner aussi de cette manière plutôt que de nous orienter vers des produits neufs. Et ce à une échelle de plus en plus locale, nous permettant ainsi d’économiser un déplacement pas forcément utile (ni spécifiquement agréable, à moins que le centre où vous vouliez vous rendre se situe pile-poil à côté de votre endroit préféré !), et malheureusement de plus en plus coûteux.
En définitive, nous orienter de plus en plus vers ce modèle de consommation circulaire, c’est nous donner la possibilité croissante du choix, tout en facilitant les économies d’échelle (en terme de coûts, d’énergie, ou encore d’efforts de communication).
Économie circulaire : la panacée ?
Bien sûr l’économie circulaire a ses détracteurs, à raison, et connaît des limites qu’il est important d’avoir à l’esprit. Une simple recherche permet d’en apercevoir le panorama, très bien expliqué, notamment, sur l’article Wikipédia consacré à l’économie circulaire et sur le site du Centre National d’Information Indépendante sur les Déchets, dont je livre ici des extraits.
« En tant que théorie, l’économie circulaire est compatible avec les théories de l’économie de la frugalité ou de la décroissance ou de la sobriété heureuse. Elle semble cependant également compatible avec un modèle classique optimisé et intégrant l’écoconception, mais reposant toujours sur le recyclage rapide d’objets rendus désuets par la mode et la publicité ou par une obsolescence technique programmée.
Le concept d’économie circulaire est toutefois trompeur, selon les décroissants. Il fait fi des considérations énergétiques qui veulent qu’à chaque étape, quelle qu’elle soit, il faille introduire derechef de l’énergie dans le cycle. Par ailleurs, il est impossible d’empêcher entièrement la dissémination des matériaux. Le cycle théoriquement fermé s’avère en réalité pour partie ouvert. » [29]
Comme le souligne le CNIID il faut aussi garder à l’esprit que le message du recyclage ne doit pas devenir un alibi pour arrêter tout effort d’innovation dans la réduction des déchets à la source (ce qu’on nomme l’éco-conception) : « achetez du jetable, ce n’est pas grave c’est recyclable, la planète vous dit merci ! ».
Pour qu’il soit rentable, le recyclage nécessite en effet des gisements suffisamment conséquents. Ainsi il faudrait des tonnes et des tonnes de sacs en plastique (par unité locale) pour que leur recyclage soit économiquement viable. Dans ce cas, l’option à privilégier est la réduction à la source en supprimant les sacs en plastique et en privilégiant une alternative durable, les sacs réutilisables.
Il est aussi essentiel que la majeure partie des traitements puissent se faire localement (ce qui induirait une relocalisation de certaines industries et productions à proximité des lieux de consommation).
Enfin les déchets ne sont pas recyclables à l’infini. [30]
De la même façon que les accus ne sont pas rechargeables éternellement. Certes ils permettent de limiter fortement le recours aux piles jetables, mais l’effort devient inutile si l’on en fait un usage irréfléchi.
Se tourner vers l’économie circulaire est aujourd’hui une nécessité pour sortir à tous les niveaux de la consommation linéaire.
Mais cette remise en question serait stérile et vouée à l’échec si l’on ne reconsidère pas aussi sérieusement nos habitudes de consommation : encore mieux que consommer circulaire, ne pas acheter ce dont on n’a pas besoin ou réellement envie, s’orienter vers des productions locales, limiter le recours aux emballages en privilégiant l’épicerie en vrac, consommer des biens durables pour espérer bientôt pouvoir bannir le jetable.
Réfléchir notre rapport à la consommation et repenser notre rapport aux objets
Au-delà de nos modes de consommation, c’est nos mentalités qu’il faut faire évoluer.
Et cela ne peut se faire sans analyser les pourquoi...
Quelles sont les origines de nos achats compulsifs ? Ne s’agit-il pas plus d’une compensation affective que d’un réel besoin matériel ? Ne répondent-ils pas à un circuit de la récompense altéré, voire perverti, qui nous aide à trouver des justifications et du sens à une organisation sociale qui en a de moins en moins alors qu’elle en demande de plus en plus aux individus dans un contexte toujours plus distendu (souffrance au travail, « bullshit jobs », manque de reconnaissance sociale et financière, manque de moyens, hyper-concurrence dans un marché du travail saturé, stress, inégalités, isolement...) ?
Et ceux qui semblent mûrement réfléchis ? Ne sont-ils pas le fruit d’une auto-manipulation, sincère mais réelle, pour répondre à des comportements sociaux qui nous échappent ?
Y céder, est-ce vraiment nous faire du bien ? Se considérer les uns les autres avec un peu plus d’amitié ne serait-il pas moins délétère (voire plus constructif...), à de nombreux niveaux et à plus long terme ?
Prendre conscience de la manipulation (dont nous sommes les victimes mais aussi les vecteurs) à l’œuvre dans les fonctionnements sociaux et les remettre en question ne nous permettrait-il pas de déverrouiller nos usages ? Souhaitons-nous réellement nous définir en tant qu’individu par les objets que nous possédons, montrons, ou par la façon dont nous choisissons de dépenser notre argent ?
La connaissance de ces mécanismes ne libérerait-elle pas, au moins partiellement mais c’est déjà ça, la conscience que nous avons de notre rapport aux objets, et donc la consommation que nous en avons, vers des comportements plus pondérés et responsables ?
Tout simplement s’éduquer sur le fonctionnement du système de récompense [31] ou les notions d’habitus, d’effet de démonstration, ou de pression sociale par effet de mode (pouvoir de persuasion des prescripteurs, clients-référence, relais d’opinion ou « influenceurs », techniques du storytelling) pourrait constituer une première couche d’outils d’auto-défense intellectuelle face aux sollicitations incessantes.
Un vrai moyen de faire le tri, pour y voir plus clair, s’aider à se sentir mieux, et à agir pour plus de respect de notre environnement et de notre humanité.
Conclusion
Eskilstuna, c’est en Suède, à une petite centaine de kilomètres à l’ouest de Stockholm. Alors oui, on dit les Suédois bien en avance sur toutes les questions (et les réponses à proposer) d’ordre environnemental. Mais n’est-ce pas là justement une raison de plus pour les imiter ?
Comme l’expérience semble le démontrer, il s’agit d’une véritable stratégie gagnant-gagnant, à de multiples niveaux :
- le don de produits dont les usagers n’ont plus besoin — et le sentiment de satisfaction consécutif — (déjà au moins un premier pas vers une économie du don...),
- la diminution du coût de stockage de biens devenus inutiles (combien de personnes seules ou de couples dans des maisons trop grandes pour eux mais pas assez pour les objets amassés toute une vie durant ?),
- la création d’emplois eux aussi valorisants,
- la revalorisation de déchets, nous permettant par là même de reconsidérer la notion de déchet,
- la réalisation d’économies d’échelle (matériaux, énergie, mutualisation des coûts),
- un système économique un peu plus vertueux et respectueux de notre environnement,
- une plus large sensibilisation du public aux problématiques de notre consommation actuelle, en passant par le plaisir plutôt que par la culpabilisation,
- un premier pas, ou un pas de plus, pour interroger nos habitudes...
Un projet qui demande des efforts, tant des décideurs politiques que des commerçants, usagers et clients. Mais le jeu n’en vaut-il pas la chandelle ?
Plus de quatre ans après son lancement, ReTuna reste unique au monde. Pas faute de partager la recette... Alors à quand les prochains ? Et à quand un ReTuna à côté de chez soi ?
D’autres types d’initiatives se développent un peu partout, et avec un dynamisme encourageant (plateformes de partage, supermarchés coopératifs, permaculture, retour de l’herboristerie, expérimentations économiques, monnaies locales, éco-habitat et habitat alternatif, nouveaux modes de déplacements, etc...). Notre monde est en pleine évolution, et pas uniquement dans le mauvais sens.
Il ne tient qu’à nous et à nos actions quotidiennes de faire de ces utopies (c’est ce qu’on en aurait dit disait il y a quelques années) des réalités.
ReTuna n’est bien sûr pas LA solution, ces initiatives ne le seront peut-être pas non plus, mais au moins ça contribue. Et puis bout à bout, qui sait...
Il est bon qu’elles prennent de l’ampleur pour se substituer autant que (et tant que) faire se peut à l’existant qui a montré ses limites (et par la même occasion les nôtres et celles des systèmes dans lesquels nous vivons).
C’est ainsi que nous pourrons envisager une société meilleure, plus juste et respectueuse.
C’est urgent !
N’oublions pas qu’étymologiquement, consommer signifie détruire, anéantir [32]. Alors au risque de paraître simpliste, peut-être que limiter l’un pourrait permettre de limiter l’autre ?
Enfin, je me demande si, dans le contexte alarmiste [33] que nous connaissons, nous n’omettons pas une valeur qui pourrait s’avérer un moteur essentiel au changement, plus que la culpabilité ou la peur : le plaisir. C’est peut-être juste une question de regard, un pas de côté.
Et si nous arrivions à réinjecter un peu de plaisir et d’émerveillement ?
N’agirions-nous pas de façon plus consciente avec le plaisir toujours renouvelé de se sentir progressivement libérés des comportements attendus (et « encouragés ») par les lobbies, qui eux voient probablement d’un très mauvais œil tout changement ? Un cercle... vertueux en somme.
Pour approfondir quelques pistes et alimenter la réflexion... Je n’ai bien sûr pas pu tout mettre ni référencer, et cet article est déjà beaucoup beaucoup trop long [34]. Pour vous remercier aussi d’avoir fait l’effort d’arriver jusqu’ici, et d’avoir dépensé de votre énergie pour lire et scroller, je sens que vous avez un p’tit creux :
[1] « Upcyler », ou surcycler : récupérer des matériaux ou des produits dont on n’a plus l’usage afin de les transformer en matériaux ou produits de qualité ou d’utilité supérieure
[2] vous noterez l’effort à utiliser des mots que je n’aime pas, c’est pour la bonne cause !!!
[3] commune à une heure de train à l’ouest de Stockholm, dont l’agglomération compte 106 535 habitants en 2019, Agence gouvernementale de statistique suédoise (en) ; https://www.scb.se/en/finding-statistics/statistics-by-subject-area/population/population-composition/population-statistics/pong/tables-and-graphs/quarterly-population-statistics--municipalities-counties-and-the-whole-country/quarter-2-2019-/
[4] Dougal Shaw | BBC | 29.01.2019 | ‘Welcome to my high-fashion, trash shopping mall’ (en) ; https://www.bbc.com/news/stories-47001188
[5] Re:Pets, stand pop-up référencé sur le site de ReTuna n’était pas présent ce jour-là, je ne pourrai donc en dire plus à son sujet
[6] Malgré ma défiance personnelle vis-à-vis de cet outil, il est énormément utilisé par les acteurs de ReTuna (voire l’unique présence en ligne), autant d’idées à partager, tout de même...
[7] remise à niveau du matériel, ce qui lui permet de durer plus longtemps
[8] entre les entretiens et les dates de création des pages internet
[9] La formation dans les pays Européens, fiche Centre Inffo (fr) ; https://www.centre-inffo.fr/site-europe-international-formation/systemes/fiches-pays/suede
[10] à ce propos, un article d’Iris Joussen sur Sciences et Avenir : L’élevage de mouches-soldat noires pour recycler les déchets (fr) ; https://www.sciencesetavenir.fr/animaux/insectes/l-elevage-de-mouches-soldat-noires-pour-recycler-les-dechets_108218
[11] ReTuna | Page de présentation (en) ; https://www.retuna.se/sidor/in-english/
[12] 2019 donc
[13] PlaceBrander (sv) ; https://placebrander.se/de-vann-placebrander-of-the-year-2019/
[14] Intelligent Energy Management | Olle Dierks | Swedish Energy Agency (en) ; https://www.energimyndigheten.se/en/innovations-r--d/a-challenge-from-sweden/projects/intelligent-energy-management/
[15] Veckans Affärer (sv) ; https://www.va.se/nyheter/2019/03/14/lista-8-viktigaste-insikterna-fran-naringslivets-maktigaste-kvinnor/
[16] En effet, en Europe et dans le monde, de nombreux pays mettent en place un certain soutien à l’économie circulaire (parmi lesquels Suisse, Écosse, Japon, Pays-Bas, Danemark, Allemagne, Canada, Chine, France). La Chine aurait annoncé vouloir développer 100 « villes-modèles » dans le domaine." (Extrait de l’article Wikipédia sur l’économie circulaire ; https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89conomie_circulaire)
[17] ReTuna | Page de présentation (en) ; https://www.retuna.se/sidor/in-english/
[18] Colin Drury | Independant.co.uk | 21.07.2019 | Eco-mall where shoppers can splurge without it costing the Earth may soon be coming to UK (en) ; https://www.independent.co.uk/news/world/europe/retuna-climate-change-shopping-centre-mall-eskilstuna-sweden-sustainability-a8983511.html
[19] Ministère de la transition écologique et solidaire | La feuille de route économie circulaire (FREC) ; https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/feuille-route-economie-circulaire-frec
[20] Ministère de la transition écologique et solidaire | Politiques publiques ; https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/politiques-publiques
[21] qui contraint à certains critères, alors que le terme recyclerie est un terme générique ; https://www.ademe.fr/expertises/dechets/passer-a-laction/eviter-production-dechets/reemploi-reutilisation
[22] Plusieurs pistes à explorer depuis l’article Wikipédia « Ressourcerie » ; https://fr.wikipedia.org/wiki/Ressourcerie
[24] Adele Leberre | Actu.fr | 30.03.2018 |Finistère. Le boom des ressourceries-recycleries ! ; https://actu.fr/bretagne/bannalec_29004/finistere-boom-ressourceries-recycleries_16113736.html
[25] j’imagine que les structures en auraient les moyens, ces entrepôts auraient un tout autre aspect
[26] qui contribue à définir les mécanismes de construction individuelle et d’appartenance à un groupe social
[27] en passant souvent par la culpabilisation
[28] par exemple... au hasard... faudrait vraiment que j’y revienne un jour, mais j’ai tellement l’impression de passer pour une extra-terrestre quand j’évoque cette idée :°)
[29] Extrait de l’article Wikipédia sur l’économie circulaire ; https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89conomie_circulaire
[30] Extrait de « Les limites de l’économie circulaire, ou quand le serpent se mord la queue », Cniid-infos n°39 (Avril-Juin 2011) | CNIID ; http://www.cniid.org/Les-limites-de-l-economie-circulaire-ou,539
[31] Au passage, le système de récompense expliqué sur le formidable site Le cerveau à tous les niveaux que j’encourage vivement tous les curieux à découvrir, une merveille ! ; http://lecerveau.mcgill.ca/flash/i/i_03/i_03_cr/i_03_cr_que/i_03_cr_que.html
[32] CNRTL ; https://www.cnrtl.fr/etymologie/consommer
[33] sans doute à juste titre
[34] mais quelle est cette manie de faire des recherches, franchement !?
P.-S.
Ce reportage a été réalisé de façon totalement indépendante, vous pouvez si vous le souhaitez soutenir mon travail, et bien sûr le partager autour de vous...
Par ailleurs n’hésitez pas à discuter, apporter vos expériences, vos idées, vos réflexions... c’est comme ça qu’on avance ! =)
Édition du 6/12/2019 : retouches ponctuelles du style.
Édition du 26/02/2020 : rajout d’une courte description pour le référencement.
Derniers échanges
# Le 11 novembre 2021 à 10:22, par Aurélie B En réponse à : ReTuna, Hugo Boss et l’économie circulaire
Merci, merci pour ce super article, très fourni, très documenté. Merci pour ce reportage qui m’a permis de découvrir l’intérieur de ce magasin que je suis depuis 2018. Merci pour les pistes de réflexion, pour les liens à consulter et pour les perspectives.
Je suis convaincue qu’il nous faut inventer un autre mode de consommation et j’espère que nous y arriverons collectivement.
Aurélie
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# Le 21 novembre 2021 à 13:50, par LR En réponse à : ReTuna, Hugo Boss et l’économie circulaire
Bonjour Aurélie,
merci également pour ce chaleureux retour ! =) (et désolée pour la réactivité de la réponse... O.0’)
Oui, j’aimerais moi aussi beaucoup que nous y arrivions. Mais plus le temps passe, plus je crains que la prise de conscience à grande échelle tarde trop et nous confronte à une sobriété plus subie que décidée, et par conséquent un vécu plus traumatique que libérateur...
Raison de plus, sans doute, pour mettre les bouchées doubles, et documenter, publier largement et créer des récits positifs, et des futurs enviables. Il me semble en effet bien difficile de se projeter volontairement contre les murs qu’on nous montre tout autour de nous. À nous sans doute d’y creuser quelques failles où quelques racines pourront se frayer de nouveaux chemins, de beaux et ensoleillés chemins...
Mais... le nom de domaine de votre adresse ne me semble pas tout à fait étranger... un collectif derrière ce nom ? ou une sensibilité personnelle ? peut-être auriez-vous, au-delà de ReTuna, des idées ou des expériences à partager ?
À bientôt,
Lucie
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